Les déclarations très attendues du président Nicolas Sarkozy sur les relations de la France avec le Québec et le Canada étaient interprétées samedi par de nombreux journaux comme un plaidoyer en faveur de l’unité canadienne au détriment des indépendantistes québécois.
«Sarkozy choisit l’unité canadienne» titrait le quotidien Le Devoir, en commentant les propos du président français qui s’est aussi montré très chaleureux envers le Québec.
«Le problème pour les souverainistes (indépendantistes)… c’est qu’en un discours on est passé du célèbre "Vive le Québec libre" à "Vive le Canada uni"», notait pour sa part un chroniqueur du quotidien La Presse.
Jamais, ajoute le journal, un président français n’aura été aussi clair quant à la place de l’Hexagone dans le «délicat triangle France-Canada-Québec», depuis le «Vive le Québec libre» lancé en 1967 par le général de Gaulle, qui avait donné une impulsion au mouvement indépendantiste québécois et ulcéré le Canada anglais.
Pour le quotidien anglophone The Globe and Mail, M. Sarkozy «a livré un vibrant plaidoyer en faveur de l’unité canadienne, ouvrant dans les relations de la France avec le Canada une nouvelle page, qui porte un coup au mouvement indépendantiste québécois».
Dans un discours devant l’Assemblée nationale québécoise - le premier d’un président français dans cette enceinte - et au cours d’une conférence de presse, M. Sarkozy a parlé en termes chaleureux de la «fraternité» entre la France et le Québec, tout en soulignant que celle-ci n’excluait pas l’amitié pour le Canada.
«Je ne vois pas au nom de quoi une preuve d’amour de la France pour le Québec fraternel, familial, devrait se nourrir d’une preuve de défiance à l’endroit du Canada», a-t-il dit vendredi.
La presse québécoise mettait aussi en exergue une réponse de M. Sarkozy à un journaliste, y lisant son hostilité à une partition du Canada.
«J’ai toujours été un ami du Canada (…) Et franchement s’il y a quelqu’un qui vient me dire que le monde a besoin d’une division supplémentaire, c’est qu’on a pas la même lecture du monde», a-t-il dit.
Le Québec a connu deux référendums sur la question de son indépendance, en 1980 et 1995. La seconde fois, les Québécois n’ont rejeté que de justesse l’option de l’indépendance.
Les déclarations de M. Sarkozy - attendues car ses propos antérieurs avaient donné l’impression d’un infléchissement de la politique française en faveur d’Ottawa - interviennent cependant dans un contexte où la question de l’indépendance du Québec n’est pas d’actualité.
Le parti québécois (indépendantiste) a remis sine die la question de l’organisation d’un troisième référendum sur l’indépendance s’il revient au pouvoir à Québec.
L’ex-Premier ministre indépendantiste Jacques Parizeau, qui fut l’artisan du référendum de 1995, a vivement dénoncé samedi les propos de M. Sarkozy les qualifiant «d’énormités».
«C’est dire: nous ne sommes pas d’accord avec la souveraineté (indépendance) du Québec (…) Je ne me souviens pas d’avoir jamais vu un chef d’Etat dire ça pendant tous les débats sur la souveraineté du Québec. Même Bill Clinton, avant le référendum (de 1995 sur l’indépendance du Québec), n’avait pas été jusque-là», a-t-il dit.
Les dirigeants indépendantistes actuels se sont toutefois gardés de prendre ombrage des déclarations du président français, relevant qu’il avait parlé de fraternité avec le Québec et de relation d’égalité.
L’éditorialiste du Soleil de Québec, jugeait pour sa part qu’il n’y a «pas de quoi s’énerver» des propos de M. Sarkozy, la question du lien du Québec avec le reste du Canada relevant des Québécois et non de la France.
(Source AFP)
Par Nicolas Dupont-Aignan, samedi 18 octobre 2008 à 12:11 :: Réflexion
Pour la première fois depuis sa création le sommet de la francophonie ne sera pas clos dimanche prochain à Québec par le Président de la République française.
Nicolas Sarkozy a préféré faire faux bond à 54 chefs d’Etat et de Gouvernement francophones pour aller rencontrer, avec M. Barroso, Georges Bush.
Certes, la crise financière nécessite une rencontre entre Européens et Américains, mais il était tout à fait possible pour le Président de la République d’organiser son agenda de manière à concilier les deux évènements.
En passant en coup de vent à Québec, Nicolas Sarkozy révèle malheureusement le peu d’intérêt qu’il manifeste depuis toujours pour la francophonie et la défense de la langue française.
Comment demander aux 54 chefs d’Etats des pays membres de l’organisation internationale de la francophonie de s’impliquer, si la France manifeste un dédain à l’égard de cet engagement collectif.
Quel gâchis, quand on sait :
que le somment de Québec se tient l’année du 400ème anniversaire de la fondation de l’Amérique française par Samuel de Champlain,
que l’objet des travaux du dimanche matin est la langue française elle-même,
que c’est la première rencontre internationale, depuis le déclenchement de la crise financière, avec des chefs d’Etat de pays en voie de développement, notamment africains.
Après le discours de Dakar, qui a révulsé les dirigeants africains, après le renforcement de nos troupes en Afghanistan, après l’annonce de la réintégration prochaine de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, cette décision symbolique prend un sens particulièrement inquiétant.
En fait, le Président de la République n’a pas compris le rôle mondial de la France. Au moment où un monde multipolaire émerge, Nicolas Sarkozy conserve une vision rétrécie de la politique étrangère.
Il croit renforcer la France, et surtout son prestige personnel, en se concentrant sur la relation euro-atlantique alors qu’en vérité il enferme un peu plus notre pays dans une position de dépendance qui l’affaiblit aux yeux du monde entier.
P.S. La révélation d’une perte de 600 millions d’euros par les Caisses d’Epargne sur des marchés spéculatifs prouve bien ce que je n’ai cessé de dire depuis le début de la crise financière qu’il est irresponsable de renflouer les banques avec l’argent public sans en contre partie exiger le départ des dirigeants les plus fautifs et surtout sans revoir les règles de régulation du système.
Je renvoie, une fois de plus, aux 21 propositions que j’ai présentées le 1er octobre dernier.
En vérité, les Français découvrent avec effroi que le petit monde oligarchique qui les a précipités dans la tourmente, s’exonère de tout esprit de responsabilité.
Ce n’est pas étonnant puisque le pouvoir politique confie aux pyromanes le soin d’éteindre l’incendie.