Selon toute vraisemblance, l'opération israélienne à Gaza entre dans ces derniers jours. Sur le terrain, les officiers savent qu'ils ont jusqu'à lundi pour achever leur mission. En clair : tout doit être bouclé, mardi, jour de l'investiture du président Obama.
L'étau se resserre autour de la ville de Gaza, au nord-est du territoire. L'armée israélienne ne serait qu'à environ un kilomètre du centre-ville et elle avance extrêmement prudemment, à l'abri de tirs très puissants. D'autres unités seraient engagées à Jabalya, une zone urbaine au nord-est de la ville de Gaza. Si l'attention se porte sur ce secteur - le plus proche des villes israéliennes de Sderot et d'Ashdod qui subissaient les tirs de roquettes, l'essentiel se joue plus au sud, le long de la frontière avec l'Egypte. C'est par là que passe les armes qui approvisionnent le Hamas.
L'armée israélienne rencontre des difficultés pour détruire le réseau de tunnels, qui nous seulement traversent la fontière, mais également parcourent toute la bande de Gaza. Une entrée découverte peu conduire à cinq ou six sorties. Les forces spéciales du génie de combat (sayeret hayalom) sont particulièrement sollicitées. Elles auraient découvert des tunnels, partant de Gaza et menant en territoire israélien, faisant craindre des infiltrations terroristes.
Côté palestinien, les pertes atteindraient aujourd'hui près d'un millier de morts, dont sans doute plus de la moitié sont des combattants ou des militants du Hamas. La capacité de résistance militaire de l'organisation islamiste semble assez faible. Elle a pour l'instant infligé peu de pertes à l'armée israélienne - aucun blindé détruit par exemple. Rien à voir avec les capacités de combat du Hezbollah au sud-Liban.
Les tirs de roquettes continuent, mais plus sporadiquement. Le Hamas dispose d'engins portant à une quarantaine de kilomètres, la distance qui sépare Gaza de Beer-Sheva, la grande ville du Negev. La centrale nucléaire de Dimona, siutée à plus de 80 kilomètres de la bande, semble pour l'heure hors d'atteinte, mais Israël redoute l'effet - surtout médiatique et politique, d'ailleurs - de tirs contre ses installations nucléaires.
Dernier point : les opérations durent depuis le 27 décembre (soit 18 jours) et le front ne s'est pas élargi. Bien au contraire : la Cisjordanie, tenue par le Fatah, semble aujourd'hui déconnectée de Gaza, tenue par le Hamas. Quant au Hezbollah libanais, il s'est tenu prudemment à l'écart de ce conflit.
ANALYSE | ||||
13/01/2009 | ||||
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Tsahal: entre détermination et surestimation
Par Guillaume Belan, Rédacteur-en-chef de TTU Online | ||
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Lancé le 27 décembre, l’opération « Plomb durci » devait faire cesser les tirs de roquettes Qassam et Grad sur les villes israéliennes, qui avaient repris suite à la fin du cessez-le-feu, instauré depuis fin juin dernier. Mais l’enjeu pour Tsahal dépasse le seul cadre sécuritaire du sud du pays. Suite aux échecs de la guerre du Liban de 2006, l’objectif est aussi de redonner confiance à l’armée israélienne tout en réinstaurant le mythe de l’invincibilité de l’état hébreu. Premier bilan à chaud de trois semaines de conflit. Les indicateurs étaient « au rouge » depuis plusieurs mois. Les hauts responsables militaires israéliens se relayaient pour prévenir de l’imminence du conflit à Gaza. « Nous sommes à un haut niveau d’alerte » confiait un officier israélien rencontré à Tel Aviv début du mois de décembre. « L’affrontement à Gaza est inévitable et pour bientôt » menaçait-il. « Le Hamas ne cesse de devenir plus puissant, mieux organisé et toujours mieux armé ». A la rupture du cessez-le-feu, mi-décembre, les explosions des roquettes Qassam et Grad d’origine iranienne se multiplient. La réponse de Tsahal ne se fait pas attendre. L’opération « Plomb durci » est lancée. Avec près de 900 palestiniens tués à ce jour, Tsahal estime, probablement à juste titre, avoir porté un coup très dur aux structures politiques et militaires du mouvement radical islamiste. Mais ce qui surprend est le peu de résistance armée de la part du Hamas, pourtant crédité à la veille des opérations de 15 000 combattants et de très nombreux armements. Mais, après près de 20 jours d’intervention israélienne, aucun tir de RPG n’a été enregistré tandis que l’armement sol-air du Hamas demeure inexistant. Le seul armement sérieux en possession du Hamas semble donc se limiter aux roquettes Fadjr, version iranienne du Grad russe, dont les tirs se poursuivent malgré les efforts de Tsahal. Dans la même veine, les services de renseignements israéliens prévenaient que le terrain dans Gaza serait miné. Selon des officiers rencontrés sur place en décembre « des maisons sont bourrées d’explosifs prêts à être déclanchés dès l’arrivée de nos troupes, tandis que des IED sont placés en des points clefs. » Or, rien de tout cela ne semble avoir eu lieu. Pour preuve les pertes très légères de Tsahal, avec une dizaine de morts pour plus de 15 jours d’opérations, tandis qu’aucun blindé hébreu n’a été perdu. Tsahal aurait-il surévalué les capacités du Hamas ? Tout porte à le croire. Cette surévaluation peut trouver son fondement dans l’échec de la dernière guerre du Liban, où Tsahal avait eu à faire face à une résistance armée du Hezbollah bien mieux préparée que ce qu’escomptaient les responsables militaires israéliens. Le fait d’avoir en 2006 sous-estimé les capacités du Hezbollah pourrait avoir poussé Tsahal, traumatisé par cet échec, à avoir surestimé celles du Hamas aujourd’hui. Reste que depuis 2006, le mythe de l’invincibilité de Tsahal avait été écorné. L’Etat hébreu ne pouvait pas se permettre de perdre à Gaza. D’où l’intensité des combats lancés par l’armée israélienne, qui se doit de restaurer sa capacité dissuasive. Comme un message adressé au Hezbollah et à l’Iran. Comme une preuve de sa détermination à assurer efficacement sa sécurité, quitte à fleurter avec l'inacceptable (utilisation de munitions au phosphore blanc). De ce traumatisme de 2006, l’IDF (Israeli Defence Force) avait donc depuis deux ans, revu ses stratégies, ses équipements et ses modes opératoires. Redonner plus de place au combat d’infanterie (avec le développement d’un nouveau VCI, le Namer), améliorer les systèmes de blindages actifs (Trophy), développer un fusil d’assaut plus compact et efficace (le Tavor), miser sur le combat coopératif et le renseignement... (voir TTU n° 698) Même si Tsahal n’a pas encore complètement achevé le virage de sa transformation aux lumières de la guerre du Liban, les leçons tirées sont aujourd’hui appliquées à Gaza. Mais Gaza n’est pas le Sud Liban, plus escarpé et moins habité ; et le Hamas n’est pas le Hezbollah, bien mieux organisé et armé. |